Tunisie : la destitution de Morsi est un recul, selon Ghannouchi
Rached Ghannouchi a accordé au journal Le Monde une interview dans laquelle il livre ses impressions, voire ses convictions, quant aux récents événements survenus en Egypte et qui ont balayé Mohamed Morsi et son régime. Il donne au passage son avis sur la visite effectuée par François Hollande en Tunisie.
Pour le chef de file des islamistes tunisiens, la destitution de Morsi par l’armée est un recul qui arrive en une période historique, mais il ne doute pas un instant que l’histoire reprendra son cours normal et que la rencontre entre l’islam et la démocratie se fera obligatoirement. « Ce coup d’Etat, affirme-t-il, encourage les groupes extrémistes ». Tout en déclarant craindre un glissement vers la violence en Egypte, Ghannouchi écarte l’éventualité pour les Frères musulmans d’y avoir recours parce que c’est contradictoire avec leur stratégie.
Le président d’Ennahdha fustige le droit que s’est arrogé l’armée pour, dit-il, siffler la fin de la partie, déniant aux militaires leur droit à l’arbitrage. Les difficultés sociales, comme il en existe partout dans le monde, ont été instrumentalisées pour exécuter un coup d’Etat mûrement préparé, a-t-il accusé, avant de décréter que c’est, là, un échec de toute l’élite égyptienne. Rached Ghannouchi a évoqué la mission de bons offices qu’il a entreprise entre l’opposition et les Frères musulmans consistant en la présentation de revendications politiques rejetées par ces derniers, raisons selon lui qui ont conduit à la situation actuelle. Questionné sur l’éventualité que le cas égyptien se reproduise en Tunisie, Ghannouchi a un esquissé un parallèle entre les armées des deux pays et mis en relief les concessions accordées par Ennahdha pour «éviter toute polarisation», affirmant que [nous] vivons une démocratie consensuelle et non de majorité et que les événements d’Egypte [nous] ont donné raison.
Pour ce qui est de la visite de François Hollande en Tunisie, le leader islamiste estime qu’elle représente une nouvelle page et bannit toutes les idées qui ont circulé sur la fin des relations franco-tunisiennes, suite à l’arrivée des islamistes au pouvoir. En fait, dit-il, ces relations n’ont jamais été rompues, elles ont été au contraire développées. « Le fait que François Hollande ait appelé au retour aux urnes le plus rapidement possible en Egypte est une position équilibrée que nous partageons. »
M. BELLAKHAL